Doriand, Lieu-dit

Vite, vite, je vous parle de lieu-dit, celui où Doriand se pose cette fois. Ou revient même sans doute. Vite, car je n’ai pas besoin d’attendre, pas besoin de mille écoutes pour vous parler de son nouveau disque, tant attendu. Si attendu même que je n’espérais même plus de suite au grand bain d’il y a cinq ans. A l’époque, Doriand était un trentenaire doux, fin, et à vif. Et maintenant ? En douze images, Doriand m’est apparu le même, en mieux et en plus grand. Ce disque est une œuvre, au sens qu’elle aurait manqué si elle n’avait pas existé. Lieu-dit n’est pas un disque de plus sur les étals, pas une ligne supplémentaire dans un inventaire. Au contraire, Doriand signe un album dont l’absence manque aussitôt la première écoute. Doux amer, mélancolique, ironique, intime, l’album décrit avec pudeur et élégance ce qui fait vibrer les heures, d’autant plus fort que le compteur en affiche déjà un certain nombre. La langue est merveilleuse et soignée, limpide et poétique. Mélodique, elle l’est autant que les airs avec lesquels elle s’enchevêtre si harmonieusement. Souvent, malgré moi, un voile se glisse entre le plaisir et ma pensée, une déception, l’intonation d’un bémol au détour de ce qui m’aura semblé devoir être absent, ailleurs, différent, manquant ; mais là, rien, pas la moindre traine dans le bleu du ciel, pas la moindre amertume au bout de la langue. Lieu-dit est un endroit où s’arrêter, longtemps, parce que souvent et partout, la beauté manque.